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luc a écrit :Et plus sérieusement je n'y ait rencontré ni touareg, ni membres du Darfour, ni Afghans, ni Irakiens, ni Iraniens....
Chronique
Second tour sur Second Life, par Jean-Michel Dumay
LE MONDE | 28.04.07 | 14h21 • Mis à jour le 28.04.07 | 17h27
Le débat entre Ségolène Royal et François Bayrou ayant eu tant de mal à être organisé ici-bas à la télévision, suggérons une nouveauté : que le face-à-face rose/orange soit programmé aux confins de la virtualité, sur Second Life.
Second Life, si par extraordinaire vous n'aviez pas encore été cyberinformé, est l'un de ces espaces virtuels, sur Internet, où chacun peut créer son double façon bande dessinée, un avatar... Et le faire évoluer dans un décor en 3D. Les médias participent à l'engouement, de sorte que cette "seconde vie" connaît une fréquentation croissante. Le site annonce près de six millions de "résidents" au monde, dont une bonne part n'y a séjourné qu'une poignée de fois. Quelques dizaines de milliers y seraient, en revanche, connectés en permanence.
Selon la société d'études américaine Gartner, d'ici à 2011, huit internautes sur dix acquerraient une "deuxième vie" sur Internet. La prédiction vaut autant pour les particuliers que pour les entreprises, séduites par les balbutiements de l'économie virtuelle qui s'y développe. Même si Gartner recommande d'y investir avec prudence. Car tout s'y achète et tout s'y vend à coups de "Linden dollars", la monnaie locale (du nom de la société Linden Lab, créatrice du projet), convertible en dollars sonnants et trébuchants.
IBM, Adidas, Dell, Nissan, Mazda, Fox, Budweiser y ont implanté des bureaux. Renault F1 et l'organisme de crédit Cetelem viennent d'annoncer leur arrivée. Lacoste, Jean Paul Gaultier, Dior Joaillerie y ont pignon sur rue. Si l'on peut dire.
Le ministre de la culture, Renaud Donnedieu de Vabres, y a inauguré, début mars, une exposition. Des journalistes y mènent de réelles enquêtes. L'agence Reuters y tient un bureau permanent. Tout comme Paris Match, où Thomas Hollande, fils de Ségolène, y a débattu avec les internautes, vendredi 27 avril. Un mémorial a même déjà été érigé en mémoire des victimes de la tuerie de Virginia Tech, aux Etats-Unis.
On ne sait pas, pour n'y être pas encore allé, si sur Second Life l'"île" Nicolas Sarkozy fait autant rêver ou cauchemarder que son programme. Pas plus que l'espace Royal Désirs d'avenir, dont on apprend qu'il est construit en bois, ou le QG virtuel du très courtisé François Bayrou. On sait cependant qu'on y tient meetings et réunions. Et que s'y jouent parfois quelques manifestations (anti-Le Pen).
Les hommes politiques ont bien compris l'intérêt d'investir le monde virtuel. Car s'y meuvent des électeurs, certes "avatarisés", mais bien réels. "Nous atteignons des gens qui ne seraient pas venus à des meetings, des électeurs indécis", témoignait ainsi, dans le quotidien américain Washington Post, Margaux Gandelon, une jeune étudiante qui a aidé à la création du QG de François Bayrou.
Et c'est d'ailleurs ce qui étonne, cette capacité des mondes virtuels à reproduire le réel plutôt qu'à s'en abstraire. A le singer plutôt qu'à le fuir. L'homme voit presque toujours les mondes et les dieux à son image, anthropocentrés. Cela dit, l'image virtuelle n'est pas seulement l'image de quelque chose, elle est sa propre réalité. Elle absorbe le réel en elle, en est une nouvelle dimension. Cela nous titille toutefois sur l'authenticité.
Le mensuel Psychologies s'est penché, en avril, sur les motivations des résidents de Second Life. Et si ce faux monde permettait à ses habitants d'aller mieux dans la vraie vie ? Le virtuel à des fins thérapeutiques. Il y a même des psys, apprend-on, qui y donnent rendez-vous à leurs patients. Là, ceux-là y oseraient tout ce qu'ils n'oseraient pas dans le réel.
"Les gens ne se comportent pas de la même façon que lorsque vous les rencontrez dans la rue, assurait d'ailleurs Melle Gandelon. Ils sont plus ouverts aux discussions." On ne sait si cela intéresse déjà les instituts de sondage. Qu'importe, le 6 mai, le résultat final, même sur Second Life, sera tout sauf virtuel.
Jean-Michel Dumay
Article paru dans l'édition du 29.04.07.
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