arni a écrit :Je m'interroge, qu'appelez vous un son "Tubes"?
ou, un son "Tubes" ça représente quoi pour vous,
J'en ai entendu des vertes et des pas mûres sur le sujet, alors vos avis seront un bon complément d'informations sur le sujet...
Si vous pouviez décrire précisément le terme, je vous en serais reconnaissant
Au plaisir de vous lire ...
Je sens vais passer pour le vieux raseur de service qui se prend la tête là où d'autres cherchent juste à se marrer.
Et bien tant pis, le sujet me paraît trop important pour se priver d'un vrai débat… même si je suis conscient de la pauvreté du langage pour traduire certaines formes de sensations.
Avant de discuter de tube ou de transistor, il me semble indispensable de se pencher sur un mot qui, en haute-fidélité, veut, à la fois, tout et rien dire. Pour qui la ressent, la notion de transparence n'a besoin d'aucune explication. Pour les autres, ce terme ne correspond à aucune sensation identifiable, ni à aucune forme d'aspiration, et ils traitent de doux fantaisistes ceux qui en font grand cas. Comment sortir de cette mutuelle incompréhension ? Je ne vois pas de meilleure solution que de faire un détour par la photographie.
Les compacts numériques plaisent énormément au grand public. Il suffit d'enfoncer le déclencheur pour obtenir une image nette depuis l'avant plan jusqu'aux arrières plans les plus lointains. Les couleurs, hyper saturées, ont un côté "flashy" qui satisfait le plus grand nombre.
Les vrais amateurs, eux, préfèrent les appareils reflex qui présentent des couleurs beaucoup plus neutres et vraies. La plus grande différence se situe, toutefois, au niveau de la gestion de la netteté. En jouant sur l'ouverture, le photographe peut, comme le fait l'œil humain, placer la mise au point sur un objet qu'il désire mettre en valeur et entourer le reste d'un flou dosé avec précision. Celui qui regarde la photo ressent alors une impression de perspective naturelle, impossible à ressentir au départ d'une photo prise par un compact. De plus, si la vue fournie par ce dernier se révèle "assez nette" partout, elle n'offre nulle part cet extraordinaire "piqué" qu'un appareil muni d'un objectif de grande classe peut placer en un point choisi de l'image. Or, c'est précisément cette puissance de résolution qui donne à l'objet mis en évidence une telle sensation de matière et de relief.
Il suffit de se promener dans n'importe quel salon Hi-Fi pour observer qu'un large public, et en particulier de nombreux jeunes, sont attirés par une reproduction qui est, au monde sonore, ce que les images issues d'un compact sont à la photographie. Tout y est sur-caractérisé. L'impression de présence et de détail est souvent le fruit de "grosses ficelles" comme une exagération de l'aigu et du grave au détriment du médium. Dans un éditorial de la revue Diapason, J.M. Piel soulignait récemment les dangers de l'engouement pour la reproduction, aux contours artificiellement nets, que permet le MP3. Au contraire, l'audiophile et le mélomane doivent, selon lui, prêter la plus grande attention aux capacités du système à reproduire le "flou" dans toutes ses nuances. Je partage cet avis même si, pour ma part, je parlerais plus volontiers d'expressivité des arrières plans et de mise en lumière des plus fines nuances de l'acoustique. Un haut pouvoir de résolution, capable de mettre en lumière les réverbérations les plus subtiles, est un facteur essentiel du respect de la perspective sonore. Toutefois, aussi essentielle que soit la reproduction fidèle de l'environnement, la sensation de matière et le "piqué" dont bénéficient les "premiers plans" est une composante tout aussi fondamentale de la notion de transparence. La moindre inflexion de la voix, en ce compris les bruits liés à la respiration et ceux provoqués par les mouvements de la bouche (lipping) ou la rigoureuse exactitude des couleurs sonores et du timbre des instruments doivent concourir à l'illusion d'une vraie présence physique. Mais attention, cette fois, plus question de tricherie pour parvenir à ses fins. Le péché mignon de nombreux amplis à transistor, à savoir un caractère éthéré et artificiellement défini, obtenu par une projection excessive de l'aigu, n'est, ici, plus mise. Seul un réalisme "confondant", intiment lié à un équilibre parfait, est à même de convaincre l'oreille avertie.
Si pour traduire ces sensations complexes, les audiophiles francophones ont pris l'habitude de parler de transparence, les Hollandais parlent plutôt de "rust", qui se traduit par "reposant" ou "paisible". Cet éclairage différent met en évidence la nécessité de préserver la fluidité du message et d'éviter d'agresser l'oreille par une quelconque forme de "signature électronique".
Ceux qui s'attendent à ce que j'affirme que la transparence et le "rust" sont l'apanage exclusif des tubes vont être déçus. J'oserai même affirmer que la première fois de ma vie où ces notions me sont parues vraiment tangibles, c'était, il y a bien longtemps, lors d'une écoute chez Présence Audio Conseil, à Paris. L'électronique (à transistor) était signée Cello. Les enceintes étaient des AR LST modifiées par le grand Mark. A côté d'autres, bien plus quelconques, j'ai aussi fait l'une ou l'autre écoute d'exception à partir d'électroniques Nelson Pass. Enfin, ceux que cela intéresse peuvent aussi se rapporter à une des mes post récent en réponse à Papy.
http://www.cinetson.org/phpBB2/viewtopi ... start=1875
Ceci dit, il faut bien admettre que lorsque le transistor permet une transparence de haut niveau, le budget est rarement accessible au commun des audiophiles. N'en déduisez pas que le rapport qualité prix des amplis à tube est systématiquement meilleur. Là aussi, le pire à prix astronomique n'a rien d'une exception. Il n'empêche, les audiophiles futés, ont, de toutes les époques, réussi à dénicher l'un ou l'autre "extraterrestre de la planète Hi-Fi". Je veux parler de ces "petites" électroniques à tube qui parviennent à coupler le plus haut degré de transparence à un budget raisonnable. Généralement, celles-ci ne révèlent l'étendue de leur potentiel qu'avec un petit nombre d'enceintes dont les caractéristiques répondent à des critères précis.
Pour conclure, je dirais qu'à mes yeux, il n'y a, ni son du tube, ni son du transistor. Il y a,
d'un côté, une Hi-Fi banale et stéréotypée qui, depuis toujours, recours aux mêmes artifices pour accrocher le chaland. De l'autre, on trouve la véritable haute-fidélité, moins spectaculaire mais tellement plus vraie, riche et sensuelle. Comme le palais et le nez ont besoin de temps pour apprendre à décrypter un bon vin, l'oreille doit souvent parcourir un long parcours initiatique avant d'en saisir toutes les richesses. Contrairement à ce que les tubistes acharnés prétendent, aucun de ces deux mondes n'est l'apanage exclusif du tube ou du transistor. Cependant, lorsqu'un audiophile chevronné parcourt les allées des grands salons internationaux, il constate que ses aspirations à la transparence ne sont rencontrées qu'en de rares occasions. Et, il faut bien le reconnaître, les heureuses surprises se retrouvent bien plus souvent dans le clan du tube que dans celui du transistor. De là à tomber dans la généralisation "à la Papy", il y un pas… que je ne franchirai pas.
La véritable haute-fidélité ? C'est ce qui reste quant on a éliminé tous les défauts...