Bonjour Bernard,
Si par exemple, un audiophile conclue une écoute en disant par exemple qu'une enceinte dénature les timbres, alors, pourquoi un logiciel informatique n'arriverait-il pas à la même conclusion ?
Parce que pour cela il faudrait déjà qu'on soit capable de définir **comment** un audiophile, ou mélomane, fait pour **évaluer** le réalisme d'un timbre...
D'autant plus qu'il n'a pas LE timbre de référence, celui que l'instrument donnait, lors de la prise de son, à l'endroit où se trouvait le (les ?) micros.
Le **jugement** subjectif tient à mon avis beaucoup plus des transitoires d'attaque que du timbre proprement dit, et sur ces transitoires d'attaques on ne sait pas définir une mesure de distorsion (même si on sait l'analyser par FFT). Pour qu'un logiciel conclue, il faudrait déjà qu'il ait quelque chose à mesurer !
Il y a sur cela une opposition de principe, qui est incontournable :
- l'appréciation de l'auditeur appartient au domaine SUBJECTIF
- le(s) résultat(s) de mesure(s) appartient au domaine OBJECTIF
Il est impossible (et même déplacé...) de demander à une démarche appartenant à un domaine, d'évaluer quelque chose situé dans l'autre domaine, tant qu'on a pas défini des corrélations parfaitement claires ET univoques entre ces deux domaines.
Prenons par exemple l'évaluation subjective de la qualité des vins :
- on peut faire des mesures de laboratoire : acidité, tannin, degré alcoolique, viscosité, spectre de couleur, composition chimique
- on peut faire des évaluations subjectives : rondeur, corps, longueur, nervosité, perceptions de saveurs (fruits rouges, vanille, bois, cuir...) tant au nez qu'en bouche, etc...
En matière de sommellerie, il existe **des** corrélations précises entre les mesures de labo et les impressions laissées au palais, mais ça ne suffit pas à qualifier entièrement un grand vin.
En audio, les corrélations sont floues, et les interdépendances très complexes.
Les mesures peuvent QUANTIFIER c'est même leur seul but, elles sont incapables de QUALIFIER entièrement.
J'ajoute que le timbre est à mon avis le moins important des **composants** du signal : la perception de l'espace, de la matière sonore, et du mouvement, sont bien plus essentielles au réalisme de la restitution sonore.
Qu'est-ce qui, dans le signal, contient (code ?) et transmet ces informations ??? Pas le timbre, mais ses variations, ses modulations, et aussi les nombreuses reflexions du signal, qui arrivent après lui comme autant d'images fantômes, et qu'un trainage minime a vite fait de noyer.
Est-ce qu'une mesure de distorsion harmonique peut révéler le comportement d'un maillon , vis à vis de signaux aussi complexes ?
OUI, à une condition : que le comportement du maillon soit linéaire ou presque. C'est à peu près vrai pour un ampli, ça ne l'est pas du tout pour un HP :
- qui voit ses paramètres mécaniques varier dans de grandes proportions en fonction de l'amplitude des signaux
- dont la suspension montre une hystérésis d'autant plus grande que l'amplitude des signaux est élevée
- dont la course limitée produit une montée soudaine d'harmonique 3 passé un certain niveau sonore (donc sur les transitoires d'attaques)
- dont l'adaptation à l'impédance de l'air est mauvaise voire nulle en dessous d'une certaine fréquence (liée au diamètre du HP), ce qui là encore produit des distorsions importantes.
Le HP N'EST PAS linéaire, et comme on cherche à l'utiliser sur une très grande plage de sa fonction de transfert (c'est à dire avec une dynamique élevée, disons 40dB) alors on fait apparaitre ces non-linéarités à l'écoute.
Les mesures effectuées sur des signaux d'amplitude modérée, dans un gamme de fréquence où le HP fonctionne normalement, ne peuvent pas faire apparaitre ces problèmes.
En clair, mesurer la distorsion harmonique à 100Hz et 90dB ne montre pas grand-chose.
Mesurer la distorsion à 30Hz et 110dB peut montrer l'aptitude du HP à reproduire les bruits de transition.
C'est donc un **faisceau** complet de mesures, faites avec des signaux d'amplitudes variées, de fréquences variées, mesures à la fois de distorsion harmonique et d'intermodulation, mais aussi de trainage (waterfall). Tous ces résultats finissant par **donner une petite idée** de ce que le HP (dans sa charge) va pouvoir faire en terme de rendu sonore.
Une **petite** idée seulement.... c'est mieux que rien !
Bonnes écoutes
Francis